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Université de Montréal

Après un baccalauréat en adaptation scolaire, j’ai décidé de poursuivre mes études à la maîtrise et, en parallèle, je travaillais comme orthopédagogue en clinique privée. Ma philosophie a toujours été d’apprendre aux élèves à devenir autonomes et à voler de leurs propres ailes, plutôt que d’être une béquille pour eux. Au doctorat, je me suis intéressée à l’autodétermination des étudiantes et étudiants en situation de handicap : leur laisser la possibilité de faire leurs propres choix, de se responsabiliser face à leur handicap et de contribuer à la société.

Comment en êtes-vous venue à vous pencher sur cet aspect du handicap?

Au cours des dernières années, les universités ont vu apparaître une population étudiante caractérisée par le trouble déficitaire de l’attention, des troubles d’apprentissage, le trouble du spectre de l’autisme et des enjeux de santé mentale. Contrairement aux déficiences physiques, ces handicaps sont invisibles. Ces jeunes ne sont pas toujours pris au sérieux lorsqu’ils bénéficient d’accommodements, surtout s’ils réussissent. Ils peuvent également se sentir jugés parce qu’on leur accorde plus de temps ou un local séparé pour faire leurs examens. Ils nous ont fait prendre conscience des limites de l’approche catégorielle, mais aussi des accommodements. Les pratiques inclusives se sont avérées plus positives et non stigmatisantes.

En quoi consiste la pédagogie inclusive?

Il s’agit d’offrir différentes modalités d’apprentissage et d’évaluation qui répondent aux besoins diversifiés de tous. Par exemple, pour un examen, on pourrait laisser plus de temps à tous les étudiants et étudiantes, leur donner la possibilité de choisir parmi une sélection de questions ou encore d’y répondre par écrit ou d’enregistrer oralement leurs réponses. Chaque personne peut opter pour la méthode qui facilite ses apprentissages et lui permet de développer son plein potentiel.

Quels sont les avantages pour les étudiants et les étudiantes?

Actuellement, pour bénéficier d’accommodements, il faut obtenir un diagnostic d’un professionnel reconnu par l’Université, ce qui représente des coûts supplémentaires. Sans compter la justification auprès du personnel enseignant. Dans le cas d’un handicap invisible, il arrive qu’on ne croie pas la personne ou qu’on mette en doute son diagnostic. L’approche inclusive éviterait ce genre d’obstacles.

Et pour le corps enseignant?

Lorsqu’on a une classe de 150 ou de 300 personnes et que 10 % d’entre elles bénéficient d’un accommodement, c’est beaucoup de suivis! Il faut, par exemple, planifier différents examens et remettre les questions à l’avance. Avec l’approche inclusive, on s’évite toute cette gestion individuelle. Évidemment, les besoins varient d’une classe à l’autre, il faut donc être flexible et bien connaître ses groupes.

Pourquoi l’autodétermination des étudiants et étudiantes en situation de handicap est-elle importante?

Il me semble qu’on n’entend pas suffisamment leur voix. On ne les questionne pas sur ce qu’ils veulent et ce qu’ils ne veulent pas. Ce sont des humains qui ont le droit de prendre des décisions et d’avoir le contrôle sur leur vie. Pour moi, c’est primordial de leur donner la parole, mais également de les laisser faire leurs propres choix. Je veux leur donner les outils pour qu’ils puissent développer leur autonomie, s’épanouir et contribuer à la société. Je veux leur donner des ailes!